Dr Mohamed Ladib traite des tenants et aboutissants de la hernie discale lombaire
L’hernie discale lombaire est plus connue au travers de son principal symptôme, la sciatique. L’hernie du disque provoque une compression nerveuse située dans la zone lombaire. L’hernie discale touche surtout l’adulte jeune (25-45 ans). En terme médical on parle plutôt de protrusion discale
Pour en savoir plus, nous nous sommes adressés à Dr Mohamed Ladib, professeur agrégé en neurochirurgie au Centre hospitalo-universitaire Sahloul de Sousse, qui a eu l’amabilité de présenter à nos lecteurs les tenants et les aboutissants de cette pathologie qui touche bon nombre de personnes de par le monde et, bien évidemment, en Tunisie. Entretien…
Sant-tn : Peut-on parler d’origine et de symptômes de l’hernie discale lombaire ?
Dr Mohamed Ladib : Bien entendu. Concernant l’origine, d’abord, il faut mentionner qu’entre chacune des 24 vertèbres mobiles de la colonne vertébrale se trouve un disque intervertébral formé d’une structure fibreuse et solide qui contient un noyau gélatineux. Ces disques donnent une souplesse à la colonne et servent d’amortisseurs en cas de choc. Une hernie discale se produit lorsqu’un disque s’affaiblit, se fissure ou se rompt et qu’une partie du noyau gélatineux fait irruption à l’intérieur du canal rachidien. Cette partie du disque intervertébral va entrer en contact avec la racine nerveuse de l’étage correspondant, on parle alors de conflit disco-radiculaire.
Bien que la hernie discale puisse toucher n’importe quelle région de la colonne vertébrale, la grande majorité des hernies discales surviennent au bas du dos, dans la région lombaire. Dans ce cas, la hernie peut provoquer une lombalgie. Si la hernie comprime l’une des racines du nerf sciatique, elle peut s’accompagner de douleurs le long d’une jambe : c’est la sciatique ou sciatalgie. Une hernie peut aussi passer inaperçue; cela est généralement le cas lorsqu’elle ne comprime pas de racine nerveuse.
La douleur qui commence au niveau du bas du dos et qui descend également à la jambe est dite lombosciatique
La lombalgie ou la sciatique peuvent être également en rapport avec d’autres pathologies rachidiennes (canal lombaire étroit, spondylolisthésis, infections rachidienne..). Elles sont dites communes quand elles sont en rapport avec une hernie discale lombaire.
Les hommes sont plus touchés que les femmes
Pour les symptômes, la hernie discale touche surtout les individus jeunes. Les hommes sont plus nombreux à souffrir d’une hernie discale que les femmes, étant donné qu’ils sollicitent davantage leur force physique à travers leur métier ou le sport.
Le mode de début des symptômes est très variable d’un patient à un autre. Le début le plus fréquent fait suite à une action brusque dans une mauvaise posture, comme soulever une lourde charge en position de torsion du tronc. Un mode progressif peut être également une forme de début de la symptomatologie
La douleur en rapport avec une hernie discale peut commencer parfois par une lombalgie (douleur lombaire) pendant quelques jours, puis la douleur descend le long de la jambe sous forme de douleur vive, augmentée par les efforts, la toux, l’éternuement, la défécation : c’est la sciatique.
Cette douleur suit un trajet bien déterminé : c’est le trajet de la racine comprimée. Dans la majorité des
cas, la douleur descend à la face externe de la cuisse et de la jambe (hernie discale L4-L5) ou à la face postérieure de la cuisse et la jambe (hernie discale L5-S1).
À l’examen, le rachis est douloureux et raide à la mobilisation. Il y a une contracture des muscles enserrant la colonne vertébrale (muscles paravertébraux). Le médecin lève la jambe douloureuse qui doit rester tendue, ce qui met le nerf sciatique en tension : une douleur violente freine la poursuite du mouvement à partir d’un certain angle.
Devant une douleur sciatique, la consultation du Neurochirurgien s’impose à la recherche de signes de gravité : la perte de la sensibilité, la diminution d’un réflexe, la diminution de la force musculaire au niveau du pied ou la jambe, ou l’existence de troubles génito-sphinctériens (mictions impérieuses, troubles de l’érection)
Quels remèdes ? L’intervention chirurgicale est-elle le seul moyen pour traiter cette pathologie ?
La lombosciatique discale est une affection bénigne dans 95% des cas et dont l’évolution naturelle se fait habituellement dans un délai variable vers la guérison. Le patient peut consulter un neurochirurgien, un rhumatologue ou un médecin de rééducation.
Le traitement est avant tout médical. Il associe le repos au début, les antalgiques, les anti-inflammatoires et les infiltartions. Après la disparition de la douleur, la kinésithérapie permet de remuscler le dos et d’éduquer le patient (gestes et positions à éviter, comment soulever une charge…).
Un traitement neurochirurgical s’impose d’urgence pour :
- Les sciatiques très douloureuses et résistantes à tous les traitements
- Les sciatiques déficitaires (c’est-à-dire avec paralysie) : marche impossible, hypotonie, amyotrophie…La chirurgie est nécessaire en raison d’une possible aggravation brutale et irréversible ;
- Les sciatiques avec des troubles urinaires, sexuels ou des troubles du sphincter anal
La chirurgie conste en une libération de la racine comprimée en enlevant la partie du disque qui a fait hernie dans le canal rachidien.
Quelles précautions faut-il prendre après l’acte chirurgical ?
Pendant les 15 premiers jours
Du fait des lombalgies postopératoires, le patient doit avoir une activité réduite. Il faut éviter de faire le dos rond. La position assise prolongée doit être évitée pendant au minimum un mois jusqu’à la cicatrisation des muscles paravertébraux. Les chaises utilisées doivent être dures, bien droites et pas trop basses. Pour se baisser, il faut plier les genoux en gardant le buste droit.
Après les 15 premiers jours
Le patient opéré d’une hernie discale peut reprendre progressivement une vie normale en fonction de l’évolution, surtout, de sa lombalgie. La marche sur des petits trajets est préférable.
Après le contrôle de 2 mois, le patient peut reprendre son travail en évitant le port de charge lourde, la position assise prolongée et les efforts physiques intense. Un reclassement professionnel est également envisageable en concertation avec le médecin du travail.
Peut-on prévenir une hernie discale ?
Des conseils d’hygiène de vie simples permettent de prévenir ou limiter les conséquences d’une protrusion ou hernie discale.
Il s’agit de faire de l’exercice régulièrement, de s’échauffer avant de commencer un effort et de veiller à maintenir une musculature abdominale et dorsale satisfaisante (soutien de la colonne vertébrale).
Un surpoids doit être évité autant que possible par une alimentation équilibrée.
Les gestes et postures sont des étapes fondamentales de la prévention : dos droit, regard droit, s’accroupir en fléchissant les genoux pour soulever une charge, périodes de repos pour se dégourdir ou s’étirer en cas de station assise, chaises à dossier droit et si possible pivotantes pour éviter les torsions.
Le port de sacs à dos est préférable aux sacs à main, et les talons hauts (plus de 5 cm) sont déconseillés.
En plus de ces conseils et en cas de hernie discale avérée, il est déconseillé de se pencher trop en avant ou de faire des efforts (port de charge…).
Propos recueillis par
Noureddine HLAOUI
Dr Mohamed Ladib
Professeur agrégé en neurochirurgie
Centre hospitalo-universitaire Sahloul de Sousse